Nouveau dialogue de Sartrounet et Sartrichon


Sartrounet : Dis donc, ce préfet Leschi qui commandait la manœuvre lors de la récente liquidation du village rom de Bobigny, son nom me dit quelque chose... Avant d’être « préfet à l’égalité des chances en Seine-Saint-Denis » (c’est son titre, c’est écrit dans le journal et ça ne s’invente pas), il était pas un peu...

Sartrichon :... tout juste, ta mémoire ne te trahit pas : trotskyste, sinon de stricte obédience, suffisamment du moins pour cultiver l’amitié de quelques intellectuels de la Ligue et porter la banderole dans les manifs, au premier rang – histoire d’être sur la photo, quoi... Mais déjà doté d’un certain sens pratique, tu remarqueras : dès que Chevènement a lancé le Mouvement des Citoyens, il a flairé le coup et a sauté le pas...

Sartrounet : … Ah oui, ça me revient ! Et quand le grand homme de Belfort est devenu premier flic de France, il en a fait un sous-préfet - aussi simple que ça !

Sartrichon : C’est ça, et c’est l’honneur de ces gens-là - perpétuer les traditions... celle du clientélisme romain, en l’occurrence.

Sartrounet : Exactement ! Tu me diras que ça ne tombait pas mal pour lui : étudiant en histoire un peu indolent, avec cette thèse sur les fascismes de l’entre-deux-guerres qui traînait en longueur, charge de famille...

Sartrichon : C’est sûr, faut gagner sa croûte, mais enfin, y’a la manière.... Et puis de là à passer aux travaux pratiques, si allègrement ! De là à aller faire son petit Chiappe sur les bords du canal de l’Ourq aux petites aurores, dans la froidure d’un matin de novembre... J’espère qu’il est pas allé y attraper un mauvais rhume...

Sartrounet (s’animant) : Tu n’y comprends rien ! C’est ça le service de l’Etat ! Je me rappelle, le Didier, quand on buvait des coups ensemble (même qu’il était plutôt marrant, avant qu’il lui pousse un képi...), il nous resservait toujours la même citation de son maître et bienfaiteur : « quand on est aux affaires et qu’on n’est pas d’accord avec un coup politique, on ferme sa gueule ou on démissionne ! ».

Sartrichon : Bon, là, en tout cas, son choix a été clair... J’espère qu’au moins il s’est posé la question...

Sartrounet : Pas sûr, pas sûr... c’est le coup du doigt dans l’engrenage... la tête tarde pas à y passer aussi... Et puis, sur les roms, faut dire que l’exemple vient du sommet : pas d’états d’âme, pas de discussion, on liquide !

Sartrichon : Belle miniature d’époque, en tout cas... Tiens, ça me donne une idée : tu sais, quand un type vient d’être élu à l’Académie française, ses amis se cotisent pour lui acheter son épée. Et si on offrait à Didier un bulldozer d’or  ?

Sartrounet : C’est pas con... Ou bien alors une doublure en fourrure pour sa parka... parce qu’au train où vont les choses, de l’ « égalité des chances », il en a pas fini de leur en coller, aux roms... Et t’imagines, en plein hiver, le pauvre, habitué à la douceur corse...

Sartichon : A moins qu’on l’envoie dans le Tarn...

Sartrounet : Ah oui, carrément, à la grenade...

Sartrichon : Comme au temps de sa folle jeunesse...

Sartrounet :... dans l’autre camp.

Sartrichon : Dans l’autre camp... rom !

Sartrounet : (soupirant) : Très drôle...