« Battisti doit pourrir en prison »…

, par Philippe Bruno


… « Il ne doit pas en sortir vivant ».

Une Internationale noire et ouvertement fasciste, du Brésil à l’Italie, se réjouit de l’arrestation de Cesare Battisti.

Mais les démocrates, les pro-européens, sont tout aussi heureux. Oui, on a enfin eu Battisti, il doit être en prison, même 40 ans après, même s’il n’est plus dangereux, même si, même si, même si… En dépit de siècles de droit pénal, une histoire du droit bafoué, des procès grotesques, des accusations sans vérifications…on veut la prison, que la prison, même à vie. Vive la prison à vie ! Pourquoi ? Bon sang, parce que ce Battisti ne s’est jamais repenti !

On le voit bien. L’enjeu va au-delà de Battisti. Battisti est un plébéien comme tant d’autres qui ont choisi la politique en prison dans des années de braise et de joie.

C’est ça l’intolérable.

Un anti-communisme fasciste ou démocrate pavoise, un anti-communisme, sans le communisme, avec le « spectre » du communisme. Il faut frapper le spectre, après avoir frappé les corps et les esprits de tous ceux qui se sont révoltés en 68 et après. Battisti, malgré lui probablement, est une des silhouettes encore vivantes, encore libres, de ce spectre, surtout de tous ceux qui n’ont pas baissé la tête. Dans un article immonde, d’un important quotidien italien [1], le journaliste, certainement laïc, démocrate et bien cultivé, parlait moins de la mise au pilori, de l’exposition fasciste du corps du prisonnier, que du « sourire malin » de Battisti. Malgré tout, Battisti, sous la barbichette, ricane encore. Ce prolétaire inculte nous défie toujours ! Au moins il arrêtera de boire des verres de caïpirinha au Brésil, en profitant des couchers de soleil sur la mer, dit le journaliste démocrate. Quel infâme, résume Salvini.

Avec Battisti, et la campagne anti-communiste en cours, on comprend que les années 68 sont toujours là.

Avec le retour de Battisti, reviennent en Italie quarante ans d’histoire ensevelie, refoulée.

Pour les anticommunistes, Battisti c’est le dernier scalp. La descente de l’avion de Battisti signe leur triomphe définitif.

Ils sont nombreux, mais ils ont peur.

A la fin, la mise en scène fasciste de l’arrestation de Battisti est un indice de quelques inquiétudes. Le « spectre » hante toujours les sommeils des bourgeois. Battisti doit croupir en prison, on doit jeter aux chiottes la clé de sa cellule. Soif de vengeance, mais aussi extrême tentative d’empêcher que les spectres sortent de leurs tombes.

Quand ils reviendront, ils seront des millions. Ils ne ricaneront plus. Ils souriront.

Un sourire vous enterrera tous.

Philippe Bruno