Du côté de chez Swine

, par Elsbeth Coquelet


« N’habite avec intensité que celui qui a su se blottir ».
Gaston Bachelard, La poétique de l’espace (1957)

1- Zelensky : le small pet, le small Petlioura de Washington !

2- Fatigue intellectuelle : ce n’est pas tellement qu’on lit moins, qu’on écrit moins, qu’on fait des siestes plus longues. C’est surtout que la pensée s’affaisse, qu’elle perd de son tranchant, qu’elle tend à devenir accommodante. Cela commence très, très tôt, chez certain.e.s.

3- Hiérarchiser les animaux sur le modèle de la société de cour : le roi, ses courtisans, ses sujets – Les fables de La Fontaine, le roi lion et le peuple des souris... Mais on peut voir les choses autrement : chaque espèce se divise en patriciens et plébéiens : le cobra, c’est le patricien parmi les ophidiens, les orvets, la plèbe. Les ergoteurs et les savantasses objecteront que l’orvet n’est pas un serpent, plutôt un reptile saurien – mais bon, vous m’avez compris.

4- Le propre du barrage, républicain ou pas, aquatique ou électoral, est d’être fait pour être contourné, à pied sec : on fait un détour et on se retrouve sans encombres de l’autre côté, avec un Barnier aux affaires et la télécommande dans la main de Marine. On doit apprendre ça aussi dans les écoles de guerre – mais les stratèges du NFP n’y sont pas passés – ils ont fait leurs classes à la MNEF, dans les loges maçonniques, dans les Grandes Ecoles, à la Mairie de Paris, etc. Il n’y ont pas appris qu’un barrage, aussi massif soit-il – il suffit d’en faire le tour !

5- Dommage qu’on ait fini par renoncer à la peine de mort – on aurait pu féminiser avec profit la profession de bourreau : 50% de bourreaux, 50% de bourrelles – cruelles, forcément cruelles.

6- Deux femmes qui avaient alimenté sur internet la rumeur selon laquelle Brigitte Macron serait un homme converti en femme viennent d’être condamnées à 8000 euros d’amende pour « diffamation ».
On ne comprend pas : en quoi l’allégation, fantaisiste comme elle est, est-elle diffamatoire ? Y aurait-t-il honte à être trans ? Par les temps qui courent, on avait plutôt l’impression que le vent soufflait dans l’autre direction... La vraie faute des allumées du Net dopées aux fake news ne serait-elle pas plutôt d’avoir offensé une personne de sang royal ? Mais, outre que nous vivons en République, en France, il n’y a pas de First Lady, dotée d’un statut privilégié. Rappelez-vous comment Mme Trierweiler fut, en son temps, congédiée par M. Grassouillet – comme la dernière des concubines...
Est-ce un crime de lèse-majesté, désormais, que broder autour du motif du look quand même un peu queer (ou weird, comme on voudra) de l’épouse présidentielle, avec sa dégaine coiff’ toutou et ses ensembles Chanel ? Si je vais clamant aux quatre coins du village que mon voisin est, contrairement aux apparences, une femme plutôt qu’un homme, est-ce un délit ? (que je m’expose, ce disant, à ce qu’il dévisse les boulons de la roue avant gauche de mon véhicule par une nuit sans lune est une autre affaire). La rançon de la notoriété (qui n’est pas gloire) des puissants n’est-elle pas que le bon peuple prenne plaisir à gloser, parfois à délirer sur leur compte ? N’existe-t-il aucune différence entre raconter des histoires, aussi abracadabrantes soient-elles, et diffamer, décrier, calomnier, insulter ? – entre dire : je le sais de source sûre, Mme X est transgenre, à moins qu’elle ne soit un travesti, et s’emporter : Mme X, c’est la sale espèce dégénérée, etc. ? On n’a plus le droit de fantasmer sur les importants et de colporter à leur propos les rumeurs les plus folles ? Est-ce la faute des faibles d’esprit et des crédules si la Toile est devenue l’amplificateur de tous leurs délires ?

7- Mélenchon : la veste de cuir et la cocarde tricolore. A la fin, c’est toujours la seconde qui gagne (ou plutôt qui perd), la veste de cuir du vieux bolchevik, c’est du folklore vintage. Trotsky réécrit par Léon Blum. Bouffon, blaireau.

8- Quand une rivière sort de son lit, c’est juste qu’elle n’a plus sommeil, pas du tout pour emmerder les riverains – pourquoi faut-il que vous voyiez le mal partout ?

9- Deux vieux copains prennent un pot et l’un dit à l’autre : « tiens, je te raconte une blague ». « J’écoute », dit l’autre. « C’est l’histoire d’une femme entre deux âges, prénommée Muriel, non, Gisèle, et qui prend son petit déjeuner avec son mari Gaëtan, non, Philippe. Elle dit : « Tiens, Philippe, cette nuit, j’ai fait un rêve tellement dégueulasse que je n’ose même pas te le raconter, tellement j’ai honte... ». Le copain attend la suite : « Et alors ? ». « Ben rien, c’est tout ». « Ah bon... »

10- Maintenant, quand quelqu’un dit « merci », on ne lui répond plus « je vous en prie », on dit : « pas d’souci ! ». On passe d’une étiquette dictée par le code de la politesse à quelque chose de plus comportemental. On met de l’huile dans les rouages de la vie sociale, là où plane toujours la possibilité du conflit – « pas d’souci ! » suggère bien que, dans le cas présent, vous ne m’avez ni dérangé ni contrarié, mais que dans un autre, vous auriez bien pu le faire – la ligne d’horizon de la formule, c’est bien « le souci », toujours possible, et « le souci », c’est tout ce qui est susceptible de faire émerger le conflit. On dit « pas d’souci ! » précisément parce qu’on vit dans un monde où le souci est à chaque coin de rue. Alors, on le conjure. « Pas d’souci ! » est moins une formule de politesse qu’un exorcisme light.

11- Tout bien considéré, il vaudrait peut-être mieux dire les israélisés que les sionistes pour désigner ces Juifs de la diaspora qui épousent la cause de l’Etat hébreu en toutes circonstances et tout particulièrement lorsqu’elle devient insoutenable, cette cause, mais qui surtout sont déjà devenus, par mimétisme, tout à fait conformes au type suprémaciste et conquérant incarné par le colon juif en Palestine occupée. Ces Juifs-là sont des sionistes de papier, puisqu’ils vivent en diaspora. Mais pour le reste, ils ont totalement adopté le style facho-suprémaciste des colons. Les Juifs, à l’âge de l’assimilation, avaient à cœur d’être sinon aimés par les autres, du moins respectés et appréciés. Les israélisés, au contraire, comme ceux qu’ils imitent, sont animés d’un désir obscur d’être haïs – craints et haïs, inséparablement. Ce sont les pur-sang du nihilisme contemporain.

12- L’avez-vous remarqué ? Depuis le Brexit, la crème anglaise n’a décidément plus du tout le même goût...

13- Tous les victimismes conduisent au fascisme par un chemin ou un autre, y compris ceux qui se présentent à nous parés de toutes les vertus.

14- Les morts n’ont jamais la trique – la raison pour laquelle ils sont si tristes.

15- Quand deux chevaux se tiennent l’un près de l’autre dans un pré, ils sont généralement tête-bêche. C’est comme si l’un disait à l’autre (et réciproquement) : « Parle (hennis) à mon cul, ma tête est malade ».

16- Le féminisme punitif ne connaît que deux moyens de rééduquer les hommes : la honte et la prison. C’est maigre et triste.

17- Vient ce moment où rien ne bougera tant que ne brûleront pas quelques châteaux, ou plus – le moment été 89. Ce moment est venu ou plutôt : il n’en finit pas de venir.

18- Il n’existe aucune loi qui autorise les centenaires à raconter des conneries. Mais aussi bien, malheureusement, il n’en existe aucune qui le leur interdise.

19- On peut parfaitement avoir un bouquin en train et le lire dans le bus – la bellissima lingua francese.

20- Difficile de prendre la mesure (de sonder les abîmes) de ce qui est en jeu dans le silence polaire de l’immense majorité des Juifs importants, des Juifs décorés, des Juifs médaillés, fils et petits-fils indignes des Juifs étoilés, des Juifs de pouvoir, des Juifs notoires et parvenus, des Juifs respectés de France et d’Occident face à la destruction de Gaza et à l’hybris total-dévastatrice de l’Etat d’Israël. Et pourtant : ils peuvent dire ce qu’ils veulent, tout ce saccage et cette course au néant s’autorisent bel et bien de ce qu’ils sont. C’est comme si, en France, personne n’avait moufté tout au long de la guerre d’indépendance des Algériens.

21- Pour avoir lancé du trottoir, les mains en porte-voix autour de la bouche, « Tu dors, Gisèle ?! » sur le passage d’un cortège féministe, devant le Cirque d’Hiver – douze mois ferme, peine confondue avec une précédente, pour outrage à agent de la force publique.

22 – Relisez soigneusement le Chant des partisans – si c’était écrit en arabe, ça tomberait infailliblement sous le coup de la loi réprimant l’apologie du terrorisme.

Elsbeth Coquelet