Epectase du chacal cathodique

, par Grégory Matefaim


« Des caresses le soir, oui, mais des caresses le matin, je ne le supporte pas. Et plus de trois ou quatre jours de vie commune avec une femme, cela fut toujours pour moi, à vrai dire, le début de l’hypocrisie ; du sentiment le matin, aucun homme ne supporte cela. Mieux vaut encore faire la vaisselle ».
Max Frisch, Homo Faber (1957)

1- Quand les Gaulois revenaient, hirsutes, de leurs campagnes guerrières, leurs femmes se portaient à leur rencontre pour leur souhaiter la bienvelue.

2- Le dessert favori de Marine ? [1]

3- On annonce une suite à Hiver 54, le biopic inspiré par la vie de l’Abbé Pierre, avec Lambert Wilson dans le rôle du saint homme. Le classement en film X est considéré comme acquis. Ça se bouscule au portillon pour les rôles de victimes – Judith Godrèche, Adèle Haenel, Julia Roy... Titre provisoire : L’abbé n’était pas de pierre. Lambert Wilson rempile et jubile.

4- Hétérotaupies : réseau de galeries souterraines creusées dans mon jardin par des taupes exclusivement straight.

5- A défaut de pouvoir offrir au petit Zelensky un F16, cotisons-nous pour lui acheter une veste molletonnée – depuis le temps qu’il nous fait peine à se dépenser aux quatre coins de la planète en T-shirt, par toutes les températures et sous tous les climats !

6- Plutôt qu’un Hitler sans prépuce, on dira que Netanyahou est un Hitler qui a rasé sa moustache – comme il aime raser tout ce qui se tient à sa portée.

7- Ceux à qui ne font ni chaud ni froid les crimes qui se commettent en leur nom, je n’irai pas jusqu’à dire que je les porte dans mon cœur.

8- Pour avoir arboré un T-shirt portant l’inscription « JE BATS MA FEMME (au ping pong) » – trois mois de travaux d’intérêt général.

9- Que les pays dont le représentant à l’ONU n’est pas sorti de l’hémicycle démonstrativement lorsque Netanyahou y a fait son apparition tandis que son aviation pilonnait Beyrouth se dénoncent.

10- Le Christ, enfin, nous revient en femme, ayant subi tous les outrages, il s’appelle Gisèle, porte des lunettes fumées comme le regretté Christophe et ses fidèles se pressent sur son passage, des rameaux de palmier à la main. Après le martyre, la Résurrection et l’Ascension, d’un seul tenant. Demandez le nouvel Evangile !

11- Conte nihiliste et cruel : dans un pays déshérité du Sud global où sévit une tyrannie implacable, quatre mercenaires se présentent à l’aube chez un pauvre paysan, pour l’arrêter – il a été dénoncé comme subversif, informateur, en lien avec la guérilla active dans la région. Alors qu’ils s’apprêtent à l’embarquer pieds et mains entravés, sa jeune épouse, à peine sortie de l’adolescence, les supplie – elle n’ignore rien de ce qui l’attend, sa prompte disparition, l’exécution sommaire au coin du bois. Elle s’offre à eux, qu’ils fassent d’elle ce qu’ils veulent, mais qu’ils épargnent son mari. La jeune femme est tentante, les sbires se laissent fléchir et abusent d’elle à tour de rôle dans la chambre conjugale de la pauvre demeure, tandis que le mari demeure sous surveillance dans la pièce adjacente. Leur besogne accomplie, les paramilitaires s’esquivent et, à peine se sont-ils éloignés que le mari éclate en imprécations : « Espèce de salope, tu crois que je ne t’ai pas entendue geindre comme une chienne quand ces ordures se vautraient sur toi ? Si tu penses que je vais l’élever et le nourrir le bâtard qu’il t’ont planté ! ». La femme laisse passer l’orage, elle retourne en silence à ses occupations, la vie du couple reprend ses tours, sinistrement, les époux s’évitent, s’ignorent.
Un mois plus tard, les quatre salopards en treillis refont leur apparition. La femme est seule à la maison. « Il est où ton mari ? On a quelques questions à lui poser... ». « Mon mari ? Il est dans le champ, là-bas, juste derrière la colline... ». Les affreux rajustent la bretelle du fusil automatique sur l’épaule et partent dans la direction indiquée en ricanant – « on repasse te voir tout de suite après, après, puta... ».
Morale de l’histoire : on a beau chercher, on ne trouve pas – en tout cas, voici désormais l’épouse condamnée à labourer le champ (en pente) seule, avec son ventre qui s’arrondit.

12- Pierre (jouant au con) : Ben quoi, l’imposition des mains – c’est bien ce qui accompagne un sacrement, non ?

13- A ce propos, justement : la pétition exigeant l’interdiction du port du béret basque, pour les raisons impérieuses que vous savez, a recueilli, à l’heure qu’il est, 157 325 signatures. Les pouvoirs publics ne vont plus pouvoir se dérober longtemps.

14- Voir Israël comme un méga-ghetto, mental entre autres. Aux origines de la modernité, le programme de la haskala, les Lumières juives, est bien : extraire les Juifs du ghetto, les restituer à la commune humanité. Ergo...

15- Et même si toutes les Suzanne du monde s’appelaient plutôt Simone, qu’est-ce que ça changerait ? Pas grand-chose – mais la réciproque n’est pas vraie : imaginez que Simone de Beauvoir se fût appelée Suzanne de Beauvoir, le normalien Sartre ne l’aurait peut-être pas kiffée direct comme il l’a fait et la face du monde en aurait été changée : pas de Castor, pas d’amours contingentes, pas de photos du couple célèbre avec Fidel, Khrouchtchev, Tito, pas de Temps modernes fondés par Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir et Maurice Merleau-Ponty, etc. A quoi tiennent les choses, parfois...

16- On rêve parfois de rembobiner sa vie depuis un certain point – une étape, un tournant, une bifurcation que, rétrospectivement, on déplore comme fatals – le jour, par exemple, où l’on a rencontré Thérèse qui nous a tellement fait souffrir, même que c’est à cause d’elle qu’on a commencé à picoler... On ne souhaite pas rembobiner jusqu’au point de départ, repartir à zéro – qui a envie de réapprendre à se servir d’une cuillère, à chier dans le pot, à réciter ses tables de multiplications ? Non, on repère une encoche sur la ligne du temps vécu et l’on se dit : voilà, c’est là que cela part en sucette, que ça aurait pu se passer tout autrement – qu’au lieu de rencontrer Thérèse (qui m’a pourri l’existence), j’aurais appris l’indonésien, me serais spécialisé dans la protection des orangs-outangs (espèce menacée), aurais prospéré dans la réalisation de films animaliers en zone tropicale et équatoriale, serais riche et respecté, etc., etc.

17- Depuis qu’on ne voit plus la sale gueule de Dupont-Moretti, on respire mieux. Depuis qu’on ne voit plus que la sale gueule de Retailleau (« taïaut !, taïaut !, Retailleau... »), on ne respire plus du tout. Et ils appellent ça la politique, les hommes politiques – mais non, rien que des gueules, et des pires, comme dans un jeu de massacre...

18- Un lambertiste, passé ou présent, se reconnaîtra infailliblement à ce qu’il préférera toujours un congrès de Force ouvrière à une Nuit des barricades.

19- Il avait adressé, sa vie durant, des milliers de cartes postales à des inconnus dont il relevait le nom et l’adresse au hasard dans de vieux bottins, avec toujours le même message : « Tu vas payer, ordure ! ». Il ne s’était jamais fait prendre et c’est sur son lit de mort qu’il avait confié son secret à ses héritiers assemblés à son chevet. Il arrachait le masque à oxygène et se marrait doucement : « Tiens, si ça se trouve, il y en a plus d’un qui s’est tiré une balle, après avoir reçu ma carte – la preuve que tout le monde a quelque chose à se reprocher... ». Cette idée l’enchantait, elle l’accompagna et le soutint jusqu’à son dernier souffle.

20- On serait assez tenté, au train où vont les choses, de prendre les armes – oui mais – qui s’occuperait du chat ?

Grégory Matefaim

Notes

[1Les crêpes au grand Barnier.